Actualités

L’Indice de situation sociale (ISS) est un indicateur synthétique complémentaire au PIB qui dresse le bilan du progrès sociétal de la Wallonie en comparaison avec l’évolution du PIB par habitant sur une période de dix-huit années. Cette année, le rapport ISS fait partie du volet « diagnostic » du programme d’évaluation du Plan de Relance de la Wallonie.

Cette nouvelle édition de l’ISS montre qu’entre 2004 et 2020, en tendance générale, la situation s’est améliorée puisque l’indice (base 100 = 2004) a évolué jusqu’à 106,4 en 2020. En comparaison avec l’évolution du PIB par habitant, cette augmentation est moins prononcée puisque le PIB par habitant a évolué jusqu’à 108,9 en 2020.

Les résultats montrent que la crise de la Covid-19 de 2020 a entraîné une contraction de l’activité économique et une chute du PIB associée à une amélioration des indicateurs sociaux d’état de la société et à un endiguement des indicateurs de déséquilibres socio-économiques qui étaient en forte hausse au cours des cinq dernières années. Les résultats estimés pour l’année 2021 montrent une reprise de l’activité économique et un maintien de la situation sociale moyenne des Wallon·nes, très probablement lié aux mesures publiques de soutien.

Une évolution positive de l’indicateur à nuancer

L’examen de l’évolution par dimension des indicateurs clés qui composent l’ISS apporte un éclairage nuancé sur les tendances observées. Par exemple :

  • Au niveau de l’emploi, on observe une progression du taux d’emploi et du salaire médian mais une forte augmentation des travailleurs en incapacité de travail de longue durée (burn-out, dépression).
  • En outre, un renforcement des déséquilibres socio-économiques et des inégalités sociales en forte hausse depuis 2016 : un accès de plus en plus difficile au logement pour les publics précarisés et une aggravation de la précarité énergétique ; un renforcement de l’écart relatif des taux d’emploi entre les travailleurs faiblement diplômés et les travailleurs hautement diplômés ; un appauvrissement des jeunes (18-24 ans) qui sont de plus en plus nombreux à recourir au CPAS pour bénéficier du revenu d’intégration sociale.

Au-delà des indicateurs, quels impacts des crises sur la vie des Wallon·nes ?

L’ISS offre un cadre statistique de référence qui est étayé dans ce rapport par une analyse quantitative et qualitative des impacts des crises et des phénomènes récents de transformation du climat de la planète sur l’évolution des conditions de vie et des inégalités sociales en Wallonie. Cette analyse complète et nuance l’information fournie par l’ISS.

Elle montre que l’enchevêtrement des crises – Covid-19 en 2020, inondations en 2021, guerre en Ukraine, inflation galopante en 2022, avec flambée des prix de l’énergie et de l’alimentation notamment – affecte l’ensemble de la population et provoque une détérioration qualitative et quantitative de la situation de nombreuses personnes, dont beaucoup se trouvaient déjà en situation de précarité. En voici quelques enseignements :

L’état de santé mentale de la population wallonne est préoccupant, en particulier chez les jeunes. Les problèmes psychiatriques, quel que soit l’âge, sont insuffisamment pris en charge en raison de la saturation des services de santé mentale.

Sur le marché du travail, un écart croissant est observé entre d’un côté, un marché du travail « protecteur », avec ses salaires cohérents par rapport au travail et ses avantages et, de l’autre côté, des emplois à temps partiel et des emplois précaires moins protecteurs, dans des secteurs moins rémunérateurs et dans des postes qui offrent également moins de perspectives. Les femmes sont fortement surreprésentées dans la deuxième catégorie d’emplois (secteurs des soins et de l’aide sociale, du commerce, de l’Horeca, des titres services, …).

Sur le marché immobilier, la hausse des prix d’acquisition combinée à la flambée de l’inflation générale augmente les inégalités d’accès à la propriété pour les jeunes ménages et les ménages plus fragiles financièrement (vulnérabilité sur le marché de l’emploi, niveau de revenu, conditions plus difficiles d’octroi de prêt attendues dans le secteur bancaire). Parallèlement, la hausse des loyers sur le marché locatif privé, conjuguée à l’insuffisance du nombre de logements sociaux, menace l’accès au logement des publics précaires.

La vulnérabilité énergétique, très présente en Wallonie, s’intensifie de manière inquiétante : 29,5% des ménages wallons étaient touchés en 2020 par l’une ou l’autre forme de précarité énergétique selon le dernier baromètre de la précarité énergétique de la Fondation Roi Baudouin (2021) basé sur l’enquête EU-SILC 2020.

Depuis 2021, l’augmentation des multiples formes de précarité et l’arrivée sur le sol belge des réfugiés ukrainiens impactent l’afflux de demandes d’aides sociales équivalentes[1] (ASE) auprès des CPAS. En particulier, l’aide alimentaire a fortement augmenté entre 2020 et 2021 mais aussi les aides à la médiation de dettes, les aides financières renforcées en raison de la hausse des prix de l’énergie et les aides médicales non urgentes.

Dans ce contexte, la crainte de l’explosion du surendettement est réelle dans le chef de l’Observatoire du Crédit et de l’Endettement. Les médiateurs de dettes redoutent, pour 2022 et les années suivantes, une explosion des recours à la médiation de dettes et au règlement collectif de dettes pour des situations d’insolvabilité structurelle de revenus (conséquences des inondations et surtout de l’augmentation des prix des biens et services de différents postes du budget).

La vulnérabilité des Wallon.nes sur le plan des compétences numériques est élevée : 32 % de la population n’utilisent que peu ou pas les technologies numériques et seulement 29% sont capables d’utiliser des médias et des technologies numériques. Les publics les plus vulnérables sur le plan socio-économique sont les plus fragilisés face à l’augmentation de l’exigence de maîtrise des technologies numériques. Les facteurs de disparité les plus grands sont le niveau de diplôme, le niveau de revenu, l’âge et la situation familiale avec une très forte vulnérabilité des personnes isolées.

Dans les CPAS, les travailleurs sociaux sont confrontés à la gestion de problématiques nouvelles ou aggravées au cours des crises successives. Face à la démultiplication des tâches administratives, en l’absence d’une aide structurelle complémentaire, le travail social deviendrait plus administratif que social. Le temps d’écoute des usagers s’en trouve fortement réduit et ne permet plus d’établir le bilan des besoins et aides nécessaires en dehors de la seule demande d’accroche. La précarisation des publics isolés socialement s’en trouve d’autant plus aggravée.

Retrouvez le rapport complet sur notre site :

Personne de contact :

Aurélie Hendrickx, chargée de communication

0471/17.77.79

a.hendrickx@iweps.be

L’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS) est un institut scientifique public d’aide à la prise de décision à destination des pouvoirs publics. Autorité statistique de la Région wallonne, il fait partie, à ce titre, de l’Institut Interfédéral de Statistique (IIS) et de l’Institut des Comptes Nationaux (ICN).

Par sa mission scientifique transversale, il met à la disposition des décideurs wallons, des partenaires de la Wallonie et des citoyens, des informations diverses qui vont des indicateurs statistiques aux études en sciences économiques, sociales, politiques et de l’environnement. Par sa mission de conseil stratégique, il participe activement à la promotion et la mise en œuvre d’une culture de l’évaluation et de la prospective en Wallonie. Plus d’infos : https://www.iweps.be


[1] Ces aides ASE sont des aides complémentaires au revenu d’intégration.


Retour aux actualités